2017


  • Henriette Pentecost - photo Jacquotte Samperez LNC

Hommage

Henriette PENTECOST, l'amour d'une vie

8 février 2017

Henriette Pentecost n’accueillera plus l’ami de passage à l’heure du thé et des délicieuses madeleines de sa préparation. Elle a laissé ce mercredi 8 février le soleil poursuivre sa course sans elle au-dessus de son cher rocher à la voile. Une grande Calédonienne s’est éteinte. Elle avait eu 100 ans en 2016. La Maison de la Nouvelle-Calédonie partage la peine et assure de sa compassion tous ses proches, ainsi que toutes celles et ceux qu’elle aura de mille manières accompagnés.

Née le 20 août 1916 à Nouméa, Henriette Pentecost est la fille de Paul Leyraud, directeur de la Société havraise calédonienne, qui fut maire de Nouméa de 1912 à 1919, et de Jeanne Lévy.

En ce début des années trente, nul sans doute n’imagine le destin qui sera le sien, la farouche liberté dont il est le nom, le roman qu’il ne peut manquer d’inspirer*. Ce destin a un visage, celui du bel Edouard Pentecost dont très vite elle attend son premier enfant. Elle a 16 ans, il est de sept ans son aîné et est surtout métis kanak de Maré par sa mère dont il porte le nom. Il n’est pas difficile d’imaginer les multiples transgressions que convoque cet amour, un amour qui nous conte à sa façon l’histoire du pays réel. Pour Henriette et Edouard, il sera celui d’une vie.

Le 13 septembre 1932, en dépit des préjugés de l’époque, Henriette épouse Edouard avec le consentement des siens. Leur union donnera naissance à deux garçons, Michel et Philippe, aujourd’hui disparus, à une fille, Claude, et à six petits-enfants, onze arrière-petits-enfants et deux arrière-arrière-petits enfants.

Amour, travail et audace

L’aventure qui commence alors marque de son empreinte le paysage culturel et économique de la Calédonie contemporaine. Les deux jeunes gens sont sans moyens, mais forts de leur amour, d’une énergie et d’une capacité d’entreprendre hors normes, ainsi que du soutien malgré tout du père d’Henriette, ils ouvrent une librairie, alors la seule du pays. « C’est ce dont je suis le plus fière » disait Henriette, qui très vite aménage un coin lecture et discussions pour ses clients comme elle le fera plus tard dans son magasin « Blanc et couleurs », véritable référence pour les listes de mariage, riche de toutes les trouvailles que son goût très sûr dénichait lors de ses séjours en France. Rien de surprenant à ce qu’en 1973 ce soit elle qui permette au jeune Nicolas Kurtovitch de publier à compte d’auteur son premier recueil de poésie, « Sloboda ».

Mode, concession automobile, électroménager, mines… avec Edouard dont Henriette disait qu’il était « un entrepreneur avant-gardiste », avec « mille idées à la minute », ils vont bâtir au fil du temps l’un des groupes calédoniens les plus importants.

Cela compte bien sûr, mais moins probablement que tous les liens humains qu’Henriette Pentecost, « femme de caractère à la mémoire étonnante et à la vivacité d’esprit phénoménale » se souvient Joël Viratelle, directeur de la MNC, aura tissé toute sa vie. Son art de l’écoute, fait d’intelligence, de générosité, de tolérance et d’humour, restera sa marque de fabrique. Avec sa force de travail hors pair. Ayant commencé à 16 ans, elle ne prendra sa retraite qu’à l’âge de 88 ans… soit quelque 72 ans plus tard !

Très marquée par l’agonie douloureuse de sa mère, Henriette Pentecost s’était beaucoup impliquée dans l’Association de soutien au droit de mourir dans la dignité, dont elle était présidente d’honneur.

Le président Jacques Chirac lui avait remis la Légion d’honneur, en présence de Simone Veil à qui elle vouait une profonde admiration. Qu’elle repose en paix.

 

* Lire de Denyse-Anne Pentecost sa belle-fille « L’Appel du Pacifique » (Robert Laffont, 1998). Prix spécial du jury RFO 1999. Et « Wanachor mon amour – Henriette & Edouard 1932-1971 ». Disponibles notamment à la médiathèque du centre culturel Tjibaou.


Dans la presse

Télécharger le reportage de NC 1ère, avec les divers communiqués des personnalités calédoniennes suite à la disparition d’Henriette Pentecost.

Lire dans les Nouvelles calédoniennes les articles suivants :

« Henriette Pentecost, délicieusement pétillante ! » (03/03/2005), à l’occasion de son départ à la retraite.

« L’éternelle joie de vivre d’Henriette Pentecost », de Julien Mazzoni (19/08/2016), à l’occasion de ses 100 ans.

« Henriette Pentecost, l’incarnation de l’élégance d’une époque », de Pierrick Chatel (09/02/2017), pour sa disparition.

 

Photo © Jacquotte Samperez / Les Nouvelles calédoniennes